MORPHOANALYSE DE TRACES DE SANG

Le sang est un élément de preuve retrouvé, et même recherché, sur les scènes de faits de violence. Depuis 1985 et les travaux de Sir Alec Jeffreys, nous avons la possibilité d’identifier la source de sang grâce à son ADN. S’il est aujourd’hui possible d’identifier le sang, il reste crucial de d’identifier l’action ayant provoqué le dépôt de ce sang sur le support étudié, pour pouvoir le lier à l’enquête en cours.

Dès lors qu’un vaisseau sanguin est lésé, le sang se déplace hors du système circulatoire en fonction des lois de physique. Si une plaie existe, le sang s’externalise et les traces de sang se déposent sur les supports avoisinants, en fonction de différentes interactions dont les plus courantes sont :

la pesanteur (écoulement, …) ;

la force propre à la source exerçant une pression sur le sang liquide (pression cardiaque, expiration, …) ;

une force extérieure à la source de sang (action violente, …) ;

une force liée au mouvement d’un élément ensanglanté (main, cheveux, arme, …) ;

le transfert par contact entre deux surfaces, dont au moins une est ensanglantée (transfert par contact, altération par contact, transfert glissé, altération glissée).

Nommée MORPHOANALYSE DE TRACES DE SANG, cette discipline criminalistique détermine les événements à l’origine des traces étudiées. Quand cela est possible, elle établit également une chronologie de ces événements et localise les différents acteurs (victime, agresseur, spectateur…) lors des effusions sanglantes déterminées.

Ainsi l’étude des formes, des tailles, des distributions et des dispersions des traces de sang, fournit des informations telles que : le type d’arme employée, le nombre de coups portés, la localisation de l’agresseur et de la victime lors des projections sanglantes, les mouvements de personnes ou d’objets ensanglantés et la chronologie des évènements sanglants.

Ces informations sont enfin utilisées pour reconstruire la dynamique des faits sanglants et si nécessaire, ultérieurement comparées aux déclarations des témoins et suspects de ces faits.

Auparavant, le médecin-légiste interprétait les traces de sang, seul, et sans véritablement être formé, en fonction de ce qu’il voyait lors de la levée de corps et pendant l’autopsie (cf. les travaux anglosaxons publiés dès la seconde moitié du 19ème siècle, compilés par Herbert Leon MacDonell1). Aujourd’hui, discipline de criminalistique à part entière, les Morphoanalystes doivent suivre des méthodes reproductibles, transparentes et accréditées pour établir leurs conclusions au service du procès pénal.

Pour remplir sa mission, il est indispensable à l’expert d’étudier les clichés des constatations initiales documentant les traces de sang. Cette première étude peut être complétée par un déplacement sur les lieux et par l’analyse de vêtements ensanglantés. Ce déplacement permet de mieux appréhender les volumes des lieux, de vérifier si toutes les traces ont été documentées et les clichés des constatations initiales peuvent ne pas montrer l’ensemble des détails morphologiques nécessaires à l’identification des modèles de traces et ainsi de répondre aux questions précises concernant essentiellement la localisation des belligérants.

La présence de l’expert en Morphoanalyse de traces de sang lors des actes de reconstitution peut être également utile voire indispensable pour vérifier la compatibilité des témoignages mais aussi pour faciliter le travail de synthèse des différentes expertises avec les constatations initiales.

 

Philippe Esperança

Expert Criminalistique agréé par la Cour de Cassation
Expert en Morphoanalyse de traces de sang près la Cour Pénale Internationale
Certification Internationale d’Expert en Morphoanalyste de traces de sang
Fondateur du Groupe Morpho de l’European Network of Forensic Sciences Institutes (ENFSI)
Vice-Président de l’International Association of Bloodstain pattern Analysts (IABPA)